Etre acteur de sa vie
Si l’on illustre notre propos par la métaphore du théâtre, nous sommes en représentation sur plusieurs scènes différentes et par rapport auxquelles notre marge d’initiative est plus ou moins limitée.
Il y a la scène biologique qui ne nous donne quasiment aucune marge de manœuvre,
La scène sociale toute aussi contraignante mais avec quelques espaces de liberté, la scène familiale et enfin la scène intérieure, celle du théâtre intime où l’on est seul à la fois sur scène et dans la salle.
Par rapport à la succession des rôles et des habits que nous avons à endosser, certains ont notre préférence, d’autres sont rejetés. Mais quelle que soit la qualité de notre jeu, la force de nos illusions, de nos regrets, de nos nostalgies, toutes les pièces commencent et finissent d’une manière identique et nous n’avons d’autre choix que de nous plier aux metteurs en scènes qui chacun à leur façon ont organisé le déroulement du spectacle.
En nous limitant à la scène sociale on attend de chacun de nous qu’il soit capable de jouer successivement les rôles de jeune enfant, d’adolescent, d’amoureux, de père de famille et de vieillard tranquille attendant sereinement la mort.
La synchronisation qui existait autrefois entre le vieillissement biologique, social et personnel a fait place à un certain flou, visible principalement aux frontières de l’adolescence et de l’âge adulte et à celle de l’entrée dans la vieillesse.
Etre capable de bien jouer tous les rôles qui nous attendent n’est pas facile. Ceci est particulièrement vrai aujourd’hui où tout parait confus, où les frontières se sont effacées et où les rappels les plus salutaires, même s’ils sont douloureux, à la réalité de notre destin, sont comme suspendus par nos rêves, nos illusions, nos espoirs, et la publicité.
Le dernier acte est celui qui nous pose le plus de problèmes. Au moment de le jouer nous tardons à entrer sur scène, ou nous y entrons en ayant oublié notre texte si bien que les paroles que nous prononçons sont soit inintelligibles, soit trop nombreuses, soit les deux.